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Un réseau économique à l'échelle de la planète

Par Andrew Moody(China Daily) 28-04-2017

Un réseau économique à l'échelle de la planète

Dans la zone industrielle portuaire de Lianyungang, dans la province du Jiangsu, des cuves en acier utilisées pour fabriquer un type spécial de pétrolier sont vérifiées par des ouvriers de l'entreprise Tianming Special Vehicle Manufacturing Co., qui exporte au Moyen-Orient, en Amérique du sud et en Afrique. [Si Wei/For China Daily]

L'objet du Forum de la Ceinture et de la Route de la soie le mois prochain sera de rendre les choses claires : l'Initiative du même nom porte sur une mise en valeur commune, pas seulement pour la Chine.

Avec la venue, le 14 mai prochain à Pékin, de 28 chefs d'État et de gouvernement ainsi que de 1 200 délégués de pays du monde entier, le décor sera planté pour la tenue d'une réunion qui aura d'énormes retombées sur l'économie internationale pendant des années.

De fait, un expert chinois affirme que l'Initiative Ceinture et Route, qui sera au centre des débats, pourrait s'avérer d'une importance égale à la création de l'Union européenne (la Communauté économique européenne à l'époque) en 1958.

« Je pense que cela pourrait être d'une ampleur équivalente », dit Wang Yiwei, directeur de l'Institut des affaires internationales et du Centre des études européennes à l'Université Renmin de Chine, à Pékin. « On n'a jamais vu, auparavant, une telle ambition de réaliser une telle connectivité à l'échelle mondiale », dit-il à propos de l'initiative, qui avait été proposée par le Président Xi Jinping lors d'un discours prononcé au Kazakhstan en septembre 2013.

La manifestation de Pékin, à savoir le Forum de la Ceinture et de la Route pour la coopération internationale qui se tiendra les 14 et 15 mai, « sera un événement majeur pour l'initiative, qui entrera dans sa phase 2.0 », précise M. Wang. « On assistera à la création des mécanismes qui introduiront une mondialisation d'un type nouveau ».

Depuis que M. Xi a dévoilé l'initiative — qui est constituée de la Ceinture économique de la Route de la soie et de la Route de la soie maritime du 21ème siècle —, plus de 40 pays et d'organisations internationales ont signé des accords de coopération avec la Chine, et le pays a investi quelque 50 milliards de dollars (47 milliards d'euros)dans des projets d'infrastructure essentiellement.

L'un des buts du forum, au demeurant, sera de faire du concept même, non plus une initiative dirigée par la Chine et donnant lieu à des accords bilatéraux, mais une action multilatérale qui favorisera une plus grande connectivité à l'échelle planétaire.

M. Xi n'a pas caché les ambitions qu'il nourrit pour l'Initiative Ceinture et Route au Forum économique mondial de Davos en janvier dernier, où il s'est fait le défenseur de la mondialisation et où il a demandé aux pays d'œuvrer ensemble à la gestion des nombreuses incertitudes auxquelles le monde est confronté.

« Nous devrions nous prendre par la main et relever le défi », a-t-il dit. « Ce sont les braves qui font l'Histoire. Stimulons la confiance, agissons et marchons bras-dessus, bras-dessous vers un avenir radieux ».

Les principaux éléments tangibles de l'initiative à ce stade sont le Fonds de la Route de la soie, pour lequel en 2014 le gouvernement chinois a promis 40 milliards de dollars d'investissements dans les pays situés en bordure des routes, et la Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures, dont de nombreux pays occidentaux figurent parmi les membres fondateurs, notamment la Grande-Bretagne, la France et l'Allemagne ainsi que des pays asiatiques de premier plan tels que l'Inde, le Pakistan et le Vietnam.

Hugh White, professeur d'études stratégiques à l'Université nationale australienne et jadis conseiller de l'ancien Premier ministre Bob Hawke, est persuadé que le forum consistera à établir clairement que l'initiative est pour tout le monde et pas seulement la Chine.

« Pour que cela marche, il faut que ce soit quelque chose dont la prise en charge et l'acceptation soient largement partagées plutôt que d'être une simple initiative de Pékin », explique-t-il. « Le potentiel existe pour en faire quelque chose d'une très grande portée. Les pays participants seront partie prenante dans la création d'une vision et d'un cadre qui orienteront la mondialisation au cours des prochaines décennies. C'est donc d'une immense importance ».

Tom Miller, analyste principal chez Gavekal Research et auteur du nouveau livre China's Asian Dream: Empire Building Along the New Silk Road (Le rêve asiatique de la Chine : l'édification d'un empire le long de la Route de la soie) convient que l'objectif est d'expliquer clairement que l'initiative est réellement une affaire de mise en valeur commune.

« L'erreur que l'on peut faire sur l'Initiative Ceinture et Route est de penser qu'il s'agit d'un projet purement chinois », dit-il. « Ce ne peut justement pas être le cas car quelle que soit son action (celle de la Chine), elle est conduite avec des entreprises dans d'autres pays. Ce ne peut donc être qu'une question de développement en commun ».

Edward Tse, fondateur et président de Gao Feng Advisory, un cabinet de conseil en gestion d'entreprise, pense que l'Initiative Ceinture et Route est encore en gestation et que le forum consistera précisément à examiner les progrès accomplis ainsi qu'à fournir une vision pour l'avenir.

« Il est crucial pour l'ensemble de l'initiative. C'est pour discuter de la prochaine étape que tous ces dirigeants se rassemblent ». M. Tse rappelle que « l'Initiative Ceinture et Route était au départ un concept mais le concept s'est vite transformé pour donner lieu à plusieurs idées tangibles telles que la Banque asiatique d'investissement dans les infrastructures et le Fonds de la Route de la soie, ainsi qu'à quelques projets d'infrastructures très réels. Nous n'avons pas une vision claire à 100% de l'état de l'initiative ou de ce que donnera son évolution, mais d'un autre côté, les participants ont beaucoup d'intérêts en commun et voudront être de la partie ».

Certaines personnes critiques de l'initiative y voient de la part de la Chine une tentative de l'utiliser comme un moyen d'exercer une plus grande influence géopolitique.

Shen Dingli, professeur de relations internationales et doyen de l'Institut des études internationales à l'Université Fudan de Shanghai, s'inscrit en faux contre cette interprétation.« Nous n'avons aucune visée géopolitique. Ce n'est pas une stratégie. Au début », fait-il valoir, l'initiative « était bilatérale mais elle peut aussi concerner la collaboration de la Chine avec deux pays ou plus et elle peut par ailleurs comporter des projets auxquels la Chine ne participe pas du tout. S'il le souhaite, le Japon peut également en faire partie. C'est une initiative portant sur l'inter-connectivité à l'échelle mondiale. La Chine n'est en rien tenue de participer mais c'est le pays qui a lancé l'initiative. Voilà tout ».

Shi Yinhong, directeur du Centre des études américaines à l'Université Renmin de Chine et l'un des principaux experts chinois en matière de politique étrangère, affirme que l'initiative ne marcherait tout simplement pas si elle était perçue comme un instrument géopolitique chinois.

« Si elle ne concernait que les intérêts géopolitiques de la Chine, alors les autres membres seraient méfiants et auraient leurs propres intérêts à faire valoir », assure-t-il. « Ce n'est certainement pas le message que la Chine veut transmettre. La Chine a bien sûr un grand nombre d'intérêts géopolitiques mais elle les considère comme étant totalement distincts de l'initiative ».

Compte tenu du programme protectionniste de la nouvelle administration américaine, l'Initiative Ceinture et Route réaffirme parfaitement l'engagement de la Chine en faveur d'une nouvelle forme de mondialisation basée sur la connectivité internationale.

Wang Huiyao, président et fondateur du Center for China & Globalization, le plus grand centre de réflexion indépendant en Chine, estime que le forum offre l'occasion de réaffirmer d'une certaine façon l'importance de la mondialisation.

Pour lui, l'initiative « pourrait s'avérer être le nouveau moteur de la mondialisation et fournir l'élan nécessaire pour stimuler l'économie mondiale aussi bien que la croissance économique pour l'avenir. Cela fait trois ans qu'elle a été proposée pour la première fois et le temps est venu de s'attaquer aux choses sérieuses ».

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