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Un paradis riche d'histoires d'amour éternelles

Par Raymond Zhou(China Daily) 02-09-2016

Un paradis riche d'histoires d'amour éternelles
Les couleurs automnales du lac de l'Ouest à Hangzhou. [Xu Yu/Xinhua]

Hangzhou est la ville de poètes légendaires et du stupéfiant lac de l'Ouest.

Je n'avais pas mis les pieds à Hangzhou avant mon admission à l'université de la ville, qui a plus tard été fondue dans l'Université du Zhejiang, bien plus grande. Mes voisins me taquinaient en disant qu'en chemin, je rencontrerais une jolie fille déguisée en jeune homme. J'avais 15 ans et à l'époque, les étudiants n'étaient pas censés sortir avec des filles. Les gens au courant savaient que la plaisanterie était issue de la légende, vieille comme le monde, de Butterfly Lovers (« Les amants papillons » ou La Romance de Liang Shanbo et Zhu Yingtai).

Il s'agit d'une histoire à fendre le cœur que de nombreux Chinois associent fièrement à Roméo et Juliette, mais qui dès le début suit plutôt le déroulement de Yentl. Issue d'une famille aisée, Zhu Yingtai veut recevoir une bonne éducation alors qu'à l'époque, les femmes n'y avaient pas droit. Elle se déguise en homme et au cours des trois années suivantes, se prend d'une très forte amitié pour Liang Shanbo, garçon d'origines beaucoup plus humbles qui, dans cette « bromance », ne parvient pas à percer le masque et ne voit dans Yingtai que son meilleur copain.

Pour faire court, la liaison romantique ne se termine pas bien sur terre, mais les deux protagonistes sont réunis au paradis – sous la forme d'un couple de papillons. Nombre de localités dans toute la Chine prétendent être la ville natale de l'un des deux tourtereaux, mais ce qui est indiscutable, c'est que leur lieu d'études se situait à Hangzhou.

La ville sert de cadre à une autre histoire d'amour immortelle qui relève encore plus de la fantaisie à dormir debout : Madam White Snake (Madame Serpent blanc). Suivie de sa servante Green Snake (Serpent vert), l'héroïne descend des montagnes et passe une journée au milieu des mortels. Elle rencontre un jeune homme appartenant à une pharmacie locale et tombe amoureuse – l'endroit exact est le Broken Bridge (le Pont cassé) sur la Chaussée Bai. Un mot d'explication : le pont n'était pas vraiment cassé, mais en avait l'apparence vu sous un certain angle et un certain éclairage.

Bien que serpent maléfique, Madame Serpent blanc incarne la bienveillance, le courage et l'élégance. Elle adore son mari et distribue des médicaments gratuits à ceux qui n'en ont pas les moyens. Elle est démasquée et finit emprisonnée sous les fondations de la Pagode de Leifeng.

Quand je suis arrivé pour la première fois à Hangzhou, la pagode avait disparu depuis longtemps (elle s'est écroulée en 1924, ce que certains ont interprété comme un bienfait qui a libéré Madame Serpent blanc ; elle a été reconstruite en 2002). Le Pont cassé a été reconstruit en 1941, mais il est loin d'avoir le style romantique qu'on pourrait imaginer. Malgré tout, j'avais l'impression de pénétrer dans un tableau traditionnel représentant une scène issue de l'histoire, de légendes et de contes de fée.

Je ne peux oublier la première fois où j'ai posé mon regard sur le lac de l'Ouest. Les rives bordées de saules pleureurs, les reflets dansant à la surface de l'eau, les gouttes ruisselant comme des perles sur les feuilles des lotus et la silhouette des pagodes se détachant à l'horizon, tout cela avait un tel pouvoir évocateur que j'étais arraché au monde terre-à-terre et gentiment poussé dans un royaume de poésie et de paysages défilant sous mes yeux.

Hangzhou est connue pour sa beauté panoramique. Ici, ce n'est pas la nature qui seule cause l'émerveillement, mais bien plutôt la fusion sans coutures de la création divine et de la touche humaine.

La civilisation humaine dans cette région remonte à 7 000 ans. Les contes épiques de guerre et paix et de traitrise entre les anciens royaumes de Yue et de Wu, en gros les villes actuelles de Hangzhou et de Suzhou, sont encore mis en scène à l'écran. Aujourd'hui, c'est toute la région qui est considérée comme un « paradis sur terre » et forme le cœur du territoire culturellement important de « jiangnan », littéralement « le sud du fleuve Yangtsé ».

Hangzhou était la plus grande ville du monde pendant une grande partie du règne de la dynastie des Song du Sud (960-1279). L'empire des Song, menacé par les Jurchens au nord, transféra sa capitale de Kaifeng à Hangzhou, alors nommée Lin'an. En 1275, un an avant que les Mongols ne prennent le pouvoir, la ville comptait l,75 million d'habitants. Marco Polo y faisait référence sous le nom de Kinsay et la qualifiait de Cité des Cieux. Il avait vu juste en décrivant la population locale comme « sage et avenante », composée d'« hommes pacifiques de caractère » et de « femmes extrêmement talentueuses dans tous les arts de la séduction ».

Les poèmes datant de cette ère sont si nombreux que la ville pourrait bien être, sur un plan littéraire, la plus richement dotée dans toute la Chine.

Plus de 30 ans après la fin de mes études, elle m'enchante encore bien plus. Les usines polluantes ont été fermées, les bâtiments historiques restaurés avec soin, l'eau du lac est renouvelée tous les mois, les rues et les boulevards offrent des voûtes feuillues si denses qu'on a l'impression de marcher ou de conduire dans un jardin gigantesque.

Lorsque je me suis rendu à Hangzhou pour la première fois, en 1978, j'ai dû faire sept heures de bateau sur le Grand Canal, un voyage dont la durée a été ramenée à une demi-heure par autoroute. À Hangzhou, l'ancien et le nouveau, le passé et le présent, la nature et l'humanité se tiennent miraculeusement, mystérieusement, en parfait équilibre.

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